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samedi 23 octobre 2010

Un Brillant Avenir


             Ce roman relate la vie d’Elena, jeune Roumaine que l’on voit grandir au fil des pages. De la petite fille adoptée, à l’adolescente amoureuse, le lecteur la suit en la voyant évoluer, changer, fonder une famille, prendre des décisions difficiles pour elle et ceux qu’elle aime. En parallèle, il découvre Helen, cette même femme, qui, devenue américaine, a vécu joies, peines et moments douloureux, qui ont forgé son caractère autoritaire et dur, mais également sa fragilité intérieure. Elle, qui a connu l’émigration, le mariage de son fils Alexandru avec Marie, cette Française qui lui paraît froide et arrogante, et avec qui pourtant, elle sera conduite à tisser un lien fort, elle, qui souffre de  la mort de son mari Jacob, qui doit être forte et se battre désormais contre la solitude. 
 
 
Cet ouvrage se divise en quatre parties (Fille, Amante, Epouse et Mère, Veuve) et s’étend de 1941 à 2006. On y découvre une femme et sa famille, leurs ressentis, tout ce qui peut également se transposer dans nos vies et s’y comparer. Plus on avance dans la lecture, plus on a la sensation de connaître Elena, la jeune fille innocente et pleine d’espoir, et Helen, cette femme qui a perdu le goût de la vie et qui doit se battre contre l’existence. Ce sont en réalité deux histoires des phases d’une même vie qui s’intercalent (d’où la ressemblance des prénoms puisqu’il s’agit bien d’une même femme), que l’auteur a choisi d’écrire en parallèle : les chapitres alternent, l’un narrant un épisode de  la vie d’Elena lorsqu’elle était jeune, le suivant lorsqu’elle est plus âgée. Mais il y a néanmoins une certaine continuité et les événements s’ordonnent et deviennent de plus en plus compréhensibles au fur et à mesure de la lecture. Les sentiments, variés, demeurent au cœur du récit qui paraît plus réel qu’inventé, et de nombreux thèmes, et non des moindres, se glissent également entre les pages.

Pour les illustrer, j’ai choisi certaines citations que j’ai remises dans l’ordre chronologique :


1941 : Le passé, l’enfance, les souvenirs :
« Il y a l’avant et l’après. L’avant. Pieds nus courant sur l’herbe. L’odeur de la terre mouillée après la pluie. Les boutons-d’or qu’elle cueillait. Pour sa mère ? »

1950 : L’apprentissage du français, la lecture, la découverte de l’âme :
« ʺOn n’empêche pas plus la pensée de revenir à une idée que la mer de revenir à un rivage. Pour le matelot, cela s’appelle la marée ; pour le coupable, cela s’appelle le remords. Dieu soulève l’âme comme l’océan.ʺ […] J’aime Victor Hugo parce qu’il réussit à nous convaincre que les criminels ont une conscience. Quel écrivain puissant, et quelle grande âme ! […] ʺIl y a un spectacle plus grand que la mer, c’est le ciel, il y a un spectacle plus grand que le ciel, c’est l’intérieur de l’âme.ʺ »

1953 : L’école, les études, le « brillant avenir » qui l’attend :
« -Oh, ce n’est pas une question d’intelligence. J’ai une méthode. […] Je mémorise. Je lis et relis jusqu’à ce que je connaisse par cœur toutes les formules. Je n’essaie même pas de comprendre. De toute façon, je n’ai pas le temps. »

1958 : L’antisémitisme d’un pays entier (la Roumanie) :
« Jacob…il est juif ? »

1974-75 : Le courage, la « rage de vaincre » et de réussir :
« La difficulté ne l’effrayait pas. Quand on avait un but et qu’on se battait pour l’atteindre, on y parvenait. »

1988-1989 : L’expérience personnelle, le chagrin d’amour :
« Ce sont les femmes qui inquiètent Helen. A vingt-six ans, Alexandru a vécu deux grands amours ; deux fois il a eu le cœur brisé. – C’est une leçon de vie, Lenoush, il s’en remettra. »

1989 : La dictature et la Révolution :
« Morts, les tyrans qu’Alex a fuis avec ses parents et qui ont gouverné son pays pendant plus de vingt ans. Assassinés. »

1990 : L’amour, le mariage, le refus des parents face à ce mariage et leur désir de protéger leur « enfant » :
« Nous nous aimons. Rien ne peut nous en faire douter. N’est-ce pas la condition du bonheur ? »

1990 : L’inégalité de développement entre les pays :
« L’Ouest s’envole en laissant l’Est dans une poubelle. »

2003 : La maladie et la mort : Helen soigne son mari mourant :
« Elle s’approche, attrape la couverture et le recouvre. Il ne peut vraiment rien faire sans elle. Même pas dormir. Elle s’éloigne quand la pensée l’effleure que le visage de Jacob est étonnamment blanc. Elle se retourne et s’avance vers le lit. Elle pousse un cri. »


Bien que ce roman ne présente aucune action à proprement parler, les descriptions qu’on y trouve m’ont séduite. Je cite « Elle s’accouda à la balustrade et contempla Paris à ses pieds. La Seine miroitait sous le soleil comme un ruban de satin mordoré » (jolie comparaison,  n’est-ce pas ?). De plus, la proximité qu’entretient le lecteur avec les personnages, bien qu’il reste spectateur, lui permet de réaliser certaines choses dont il ne se rendrait pas forcément compte à son âge. Ainsi, nos parents nous paraissent agaçants et ont certaines fois tort, mais ils souhaitent avant tout notre bien, que ce soit dans notre vie amoureuse ou professionnelle. Egalement, l’être humain est en quelque sorte dépendant de son entourage, non pas en vivant à travers lui, mais en ayant besoin de lui pour s’épanouir.

Toutes ces choses m’ont permis d’effacer l’a priori que je me faisais de ce livre et alors, de l’apprécier à sa juste valeur. Il mérite bien le prix Goncourt des lycéens 2008.

15/20

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