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dimanche 24 octobre 2010

Le Club des Incorrigibles Optimistes

Jean Michel Guenassia, 756 pages, Prix Goncourt des Lycéens 2009

Ce livre est superbe. J'ai je l'avoue, eu du mal à adhérer, le nombre de pages me faisait déjà un peu peur, la quatrième de couverture affichait un contexte historique qui semblait guider la trame du livre dans sa totalité. L'histoire se déroule dans les années soixante et balaye une large part de cette décennie. On y retrouve les faits historiques et sociaux d'URSS, aux côtés de Staline, dans les récits de réfugiés politiques qui ont passé le rideau de fer, pour, le plus souvent, échapper à la mort, chercher une autre vie, plus vivable, s'entend. C'est aussi le période de la guerre d'Algérie, Paris tiraillé entre des mouvements politiques opposés. Tandis que la droite libératrice et conservatrice gouverne dans le pays, la gauche se bat, provocant des mouvements anarchiques. Le grand frère Marini , Frank, anticolonialiste, illustre d'ailleurs très bien ces nouvelles pensées socialistes, communistes. Pierre également revendique la liberté, critique l'ordre social, exige des réformes pour un monde plus égalitaire. Tous deux, bien que leur destins prendront des chemins différents, s'engageront dans l'armée pour défendre leurs idéaux. Tandis que l'un mourras, l'autre sera contraint de fuir on ne sait où. A travers les différents personnages transparaît une histoire, celle d'une personne unique mais également celle de tout un peuple. A Paris, la vie suit son cours. Michel Marini, pris dans ses lectures mais aussi dans ses mensonges, rencontre des gens d'origine, de culture différente. C'est ce qui fait son ouverture d'esprit et sa perspicacité. Loin d'être un simple môme de douze, c'est avec les "grands" qu'il traine et découvre la vie. Peu à peu, on découvre les différents personnages, -
qui sont nombreux, c'est pourquoi il arrive de nous perdre surtout au sein de la bande du Balto puisque les noms russes ne nous sont pas forcément familiers - que l'on arrive finalement à cerner. On perçoit leur caractère à travers leurs attitudes, le vécu de chacun qui est retracé dans des passages précis le long du livre.Au fil des chapitres, la focalisation change, généralement interne -voire omnisciente-, le lecteur se retrouve dans la tête de différents personnages, le plus généralement Michel Marini mais aussi les russes du club. On suit les difficultés d'une famille en proie au divorce des parents, celle des réfugiés des pays de l'Est qui ont dû quitter leur famille, Cécile qui ne s'en remet plus de ses déboires amoureux... Cette dernière noue une intime relation avec le petit Marini. Ils partagent tous deux une passion pour les livres. Michel qui n'a plus goût pour l'école se révèle intéressé par les arts, entre autres la littérature et la photographie, la musique et le cinéma. C'est au jardin du Luxembourg qu'il prend de nombreux clichés. C'est également la période du Rock'n'roll qui libère les esprits. Mais pour Michel, la lecture reste plus que ça. C'est une évasion, il entre dans un monde totalement différent. Il ne cesse de lire, encore et toujours, que ce soit en classe ou dans la rue... et c'est comme ça qu'un jour, il rencontre Camille. Très vite, de forts sentiments les unissent. Le poète qui se cache en Michel l'impressionne, même si elle ne sait pas qu'il s'agit d'un mensonge partiel. Le problème n'est pas là, Camille est juive et doit rejoindre son pays d'origine après son bac. Les deux adolescents seront voués à s'attendre durant de nombreuses années, ils s'en font la promesse. Au Balto, bien des choses étranges se passent ce qui pousse le lecteur à s'interroger. Outre Sartre et Kessel auxquels on fait référence, Igor, Léonid, Pavel, Werner, Imré, Tibor, Grégorios forment le club du Balto à Denfert-Rochereau. De nombreux d'entre eux consacre leur temps aux échecs. Il leur est en effet très difficile de trouver des papiers, les autorités ne coopérant pour le moins du monde et n'acceptant pas leur situation. Parmi ces réfugiés, un seul reste à part et ne semble pas être autorisé à adhérer au club : il s'agit de Sacha. Que cache-t-il, qu'a-t-il fait ? L'énigme est entière pour le lecteur. Peu à peu, tel un roman-puzzle, les indices se remettent en place, l'histoire évolue jusqu'à la découverte de la vérité et au drame. La trahison sera finalement pardonnée après une vie d'effort et d'incompréhension entre les différents partis. Qu'il s'agisse de politique, d'argent, de protection, tout concourt à créer des tensions entre les gens, envenimer leurs relations. Mais il faut se battre, s'accrocher. La vie est dure, mais elle est faite pour être vécue. Au bout d'une centaine de pages, j'ai fini par accrocher et me plonger réellement dans l'histoire. Plein de réalisme, ce livre évoque les rêves et ambitions, mais également les déceptions de quiconque, de personnages plein de réalité. Ne plus se tourner vers le passé, sans l'oublier, mais s'attacher à l'avenir sans rester inerte et impuissant dans une vie faite de souvenirs. Des personnages banals au départ, mais en proie à la folie, au désespoir, à l'espérance. Il s'agit plus de description mouvementée et évolutive,  naturaliste  que d'action à proprement parler.

Je vous conseille fortement cette lecture.

17,5/20

2 commentaires:

  1. J'ai dévoré ce livre en 3 jours ...et quand on voit le pavé, c'est dire si j'ai adoré. J'attend avec impatience son 2eme roman !

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